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30 juillet 2008

Gauche-droite. Usages et enjeux d’un clivage canonique

Chers collègues, Voici la présentation d’une journée d’études consacrée aux termes "droite" et "gauche" à Nanterre en juin 2008. Veuillez excuser les éventuels doublons. Cordialement, CLD & JLB


Gauche-droite. Usages et enjeux d’un clivage canonique

Le clivage gauche-droite est naturalisé de longue date. Il est ainsi tacitement requis de tout citoyen qu’il sache au moins classer les partis et eux-mêmes par rapport à ces deux catégories préconstruites (voir la question ultra-classique d’auto-positionnement posée par les sondeurs). On observe cependant que les définitions des mots « droite » et « gauche » varient selon les agents sociaux et les propriétés qui les constituent. C’est ce qu’illustrent les débats récents en France : Le parti socialiste est-il toujours de gauche ? Qu’est-ce que la gauche radicale et le centre-gauche ont en commun ? L’extrême droite est-elle une droite extrême, la vraie droite ou un courant à part ? Le centre est-il à gauche ou à droite ? Que signifie l’« ouverture » à gauche ou à droite ? Pourquoi se revendiquer de Jaurès quand on est candidat de droite ? Etc. Paradoxalement, le métadiscours sur la porosité de la frontière et sur la terminologie contribue à réactualiser et à entretenir ces deux catégories, masquant au passage la diversité de contenus et d’éventuels changements idéologiques. D’où par exemple les appels au désistement en faveur des candidats « de droite » ou « de gauche » les mieux placés entre les deux tours de scrutin. L’usage mécanique de ces mots postule une permanence des choses qui ne se vérifie guère. Aussi convient-il, c’est l’objet de cette journée d’études, de prendre quelque distance avec eux.

La métaphore spatiale distinguant gauche et droite est présentée comme un invariant de la vie politique française et au-delà, avec d’ailleurs de forts risques d’anachronisme, d’ethnocentrisme et d’erreurs de parallaxe. Ainsi, on sait que l’autoplacement de nombreux sondés dans les positions centrales est fallacieux car il manifeste en réalité un fort sentiment d’incompétence statutaire en matière politique. Cependant, quels que soient les contextes révolus ou les configurations récentes, ce clivage canonique, incontournable, offre l’intérêt pratique de décoder aisément campagnes électorales, stratégies d’alliance, programmes, débats politiques, etc. Il constitue une sorte de rocher immuable et imposant d’où le commentateur autorisé et le politicien avisé peuvent sans crainte affronter le flot tumultueux de la vie politique. Il est pensé ordinairement comme une donnée quasi-naturelle qui permet de rendre compte des situations en les rabattant sur ces identités et ces entités transhistoriques. Pour le journaliste, l’intellectuel, le politologue, le politique, le sondeur ou le profane, cette ligne de partage semble assigner à chacun une identité stable, une histoire différente et des héros spécifiques, constituant ainsi des répertoires de ressources irréductibles les unes aux autres. Tant et si bien que les stratégies de subversion du clivage (ouverture, extrême centre, gouvernement d’union, dédifférenciation idéologique, emprunts, etc.) font l’objet de réactions visant à en rappeler la nécessité.

La journée d’études qui se tiendra à Nanterre en juin prochain considère ce clivage, non comme une évidence, mais comme un produit social issu des instrumentalisations croisées dont il fait l’objet. En effet, la naturalisation de cette catégorie ordinaire de l’entendement politique n’est sans doute pas étrangère aux profits symboliques et matériels attachés à son maniement, à la fois comme catégorie de l’action politique et comme catégorie d’analyse (principe de division et de classement). Mais comment ce clivage devient-il progressivement un schème de pensée qui organise l’économie des échanges au sein du champ politique, et notamment la compétition intra- et inter- partisane ? Comment, sous l’effet de l’autonomisation d’un corps de connaissances sous la double forme du commentaire journalistique et d’une connaissance académique, ce clivage devient-il un cadre très prégnant de l’action et de l’analyse ? Comment, en connexion avec la division extrémiste-modéré, ce clivage routinier constitue-t-il un obstacle à l’explicitation de structures sociopolitiques autrement plus complexes ? Arrive- t-il qu’il recouvre en réalité des clivages d’un autre ordre, social, territorial, ethnique ou religieux ? Etc. : ces questions sont indicatives et non exhaustives.

Il ne s’agit donc pas de proposer une nouvelle histoire des droites ou des gauches à partir d’une approche essentialiste, cyclique, anachronique, homogénéisante ou téléologique. A côté de l’histoire des entreprises partisanes qui ont défendu à un moment donné les « idées » de gauche ou de droite, il devrait y avoir une place pour la sociogenèse de ces catégories exclusives et des usages sociaux intéressés qui en sont faits, hier comme aujourd’hui, ici comme ailleurs. De quelle façon et dans quel contexte ce clivage apparaît- il et se transforme-t-il ? Comment, à la faveur des contextes historiques, culturels et idéologiques, les acteurs politiques reformulent-ils ce clivage en fonction du système particulier des enjeux dans lesquels ils sont pris ? Dans quelles circonstances les citoyens sont-ils familiarisés avec ce clivage canonique, jusqu’à cristalliser parfois une certaine image de soi ?

La question de la genèse et des usages des identités stratégiques en politique constitue la seconde perspective abordée par cette journée d’études. Loin de s’adonner à la relativisation opportuniste du clivage ou à la quête vaine et naïve d’une définition intrinsèque des deux termes, il s’agit de comprendre pourquoi et comment ils ne veulent pas toujours et partout dire la même chose, d’où la méfiance de rigueur envers les équivalences formelles. Il convient donc d’abandonner tout espoir de trouver la « vraie » définition politique de ces mots ; cette approche, adoptée par certains savants (linguistes, sémiologues et philosophes, notamment), ne remplit pas un but scientifique, mais vise au contraire à restaurer une compétence qui leur serait propre, influer sur l’issue de la compétition politique ou imposer leur opinion personnelle comme seule valable.

Assez logiquement, l’usage de la comparaison trouve toute sa place, comme une façon d’éprouver la réalité de ce clivage. Les commentaires politiques s’appuient en effet souvent sur des comparaisons sauvages entre la vie politique française et la vie politique des autres pays. Cela fait croire que ce clivage existe de façon comparable par-delà les spécificités locales. Nombreux sont les journalistes et les experts qui ne savent pas évoquer ces systèmes d’oppositions politiques autrement que sous cette forme routinière et trompeuse. On touche sans doute ici à l’une des fonctions latentes qu’il assure : permettre à tous de « comprendre » les enjeux politiques en provenance d’autres horizons en offrant de les réduire à un jeu d’opposition connu de tous, fut-ce au prix de malentendus et de quiproquos. Or la double fonction de ce sens commun (réduction de l’incertitude et fourniture d’un code apte à déchiffrer la politique), si elle mérite en soi d’être mise au jour et à jour, n’épuise sans doute pas la problématisation scientifique.

Lors de cette journée d’études, il s’agit donc de suivre les traces des multiples déplacements de sens. On se demandera également si des termes qui sont d’abord des enjeux de luttes peuvent servir d’outils conceptuels heuristiquement féconds. L’objectif est d’apporter quelques éléments de compréhension étayés et précis aux fonctions que remplit ce clivage canonique pour les différents acteurs sociaux (hommes politiques, militants, journalistes, politologues, sondeurs, intellectuels, électeurs) qui le manient au quotidien. Ainsi, que signifie-t-il pour les citoyens ? Peut-on établir des liens entre les diverses perceptions du clivage d’un côté et le rapport à la politique et les propriétés sociales des individus de l’autre ? Y a-t-il un lien entre la proximité partisane personnelle et la vision du clivage ? Etc. Dès lors, les propositions de contribution (pour le 1er mars) peuvent s’inscrire dans plusieurs perspectives esquissées ou en puissance dans cet appel. Priorité sera donnée aux communications reposant sur des enquêtes et des matériaux empiriques.

Journée d’études organisée sous l’égide du Gap (groupe d’analyse politique, Nanterre) Organisateurs : Christophe Le Digol (MCF, Paris X) et Jacques Le Bohec (PR, Lyon 2) Contacts : cledigol@orange.fr, jacques.le.bohec@wanadoo.fr Date et lieu de la rencontre : mardi 17 juin 2008, Université Paris X-Nanterre Date-limite pour expédier une proposition : 1er mars 2008 Format de la proposition : intitulé, texte 1000-2000 signes, statut du ou des auteurs, coordonnées

© Parcoursic. Equipe : Camille Laville, Laurence Leveneur, Aude Rouger. Site web : Aude Rouger. Site propulsé par Spip
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