Appel à com : Journalisme et questions sociétales au prisme des industries culturelles
Journalisme et questions sociétales
au prisme des industries culturelles
Colloque co-organisé par le GRESEC (EA 608), Université Stendhal Grenoble 3
et le Labsic (EA 1803), Université Paris Nord-13
Institut de la communication et des Médias (Échirolles) - 26 et 27 mai 2010
Les questions sociétales (écologie, développement durable, santé, bien-être, violence, sécurité,
risque, etc.) sont aujourd’hui prégnantes dans l’espace public (Miège, 2010), et constitue presque
une spécialité journalistique à part entière. S’inscrivant dans un marché vivement concurrentiel et
se prévalant d’un rôle de « miroir de la société » et de relais des questions en débat, les médias
comme le journalisme répercutent autant qu’ils entretiennent cette mise en visibilité sous de
multiples formes et opèrent, dans ce contexte, des actions permanentes d’ajustement (Ruellan,
2005) la fois en termes de pratiques journalistiques et de stratégies de développement.
D’une part, le traitement journalistique de ces thématiques concerne à la fois :
les registres et niveaux du discours (émotion, empathie, emphase, morale, et engagement
par exemple) ;
les supports (print, audiovisuel, Internet : sites, blogs, forums, ainsi que le multisupports) ;
les modes d’écriture journalistique (utilisation des témoignages, mise en avant d’acteurs
emblématiques, ou utilisation d’expressions convenues : risque, principe de précaution,
etc.) ;
et, les genres journalistiques (portrait, éditoriaux, dossiers, voire journalisme gonzo...).
D’autre part, la médiatisation de ces nouvelles thématiques dans l’espace public contemporain
n’est plus seulement initiée ni maîtrisée par les seules industries médiatiques. De nouveaux
acteurs et dispositifs communicationnels sont partie prenante de ce mouvement, inscrit dans un
contexte industriel affirmé. Les mutations récentes des industries de la culture, de l’information et
de la communication ont en effet non seulement bouleversé les entreprises médiatiques (tant du
point de vue de la production que de celui de la diffusion de l’information), mais aussi les
modalités de publicisation des questions sociétales.
Dans cette optique, la mise en visibilité progressive des questions sociétales s’inscrit
simultanément dans différents processus socio-économiques et socioprofessionnels en cours :
touchant les infrastructures des Industries de la Culture de l’Information et de la
Communication (ICIC) (crise économique, multiplication des supports numériques, arrivée
des Gratuits, mouvements de financiarisation, concentration croissante, production
multisupports [Gestin et alii], externalisation de la production [Rebillard], etc.) ;
touchant les nouvelles modalités d’expression publique (techniques numériques, dispositifs
participatifs, débats publics, blogs, dispositifs interactifs, etc.)
bousculant les modalités d’expressions militantes plus ou moins organisées : associations,
réseaux sociaux, etc.
Considérant que le journalisme est un élément constitutif des industries culturelles, ce colloque
souhaite interroger les rapports entre journalisme et questions sociétales au prisme de ces
industries. Il entend ainsi apporter des éléments de réponse et de réflexion aux questions
suivantes : comment les processus qui amènent le journalisme à se saisir des questions sociétales
sont-ils intrinsèquement liés aux modalités de fonctionnement des industries culturelles ? Quels
enjeux économiques, politiques et sociaux soulèvent ces nouvelles productions et activités
journalistiques ?
Les propositions attendues questionneront le journalisme au prisme des industries culturelles et
s’attacheront à en montrer les incidences sur le champ journalistique et ses pratiques.
Les contributions pourront notamment être centrées autour des quatre dimensions suivantes :
1. La production journalistique, produit d’appel des entreprises, média et hors-média ?
Dans le contexte de mutations des ICIC, ce colloque propose d’ouvrir un espace de réflexion à la
croisée des analyses socio-économiques des ICIC, du journalisme et de la sociologie des médias,
afin de questionner la nature réelle du journalisme contemporain, qui s’étend bien au-delà de
l’offre de la presse éditeur, fût-elle numérique. L’offre d’information est en effet marquée
aujourd’hui par une grande hétérogénéité : pour les entreprises, non seulement médiatiques
d’ailleurs, certaines productions journalistiques ont un statut de « produit d’appel », c’est-à-dire
proposent une offre de récits ritualisés et renouvelés quotidiennement, ayant pour seul but
d’entraîner le consommateur vers des portails et autres produits dérivés à valeur ajoutée (ex. :
infos « service », « santé », « conso », critiques ou encore chroniques dans la presse gratuite, les
sites web ou certaines chaînes de la TNT). Ceci afin de mieux répondre à une vive concurrence
s’exerçant, à l’intérieur des groupes-média de groupe à groupe, de média à média, etc.
2. Extension du champ journalistique (info-service, expertises, alertes, infotainment…)
Conséquence de cette multiplication de l’offre journalistique, le champ journalistique lui-même
connaît une expansion (Ringot, Utard, 2006) : les questions sociétales permettent à de nouveaux
acteurs d’acquérir un statut de « lanceurs d’alerte » (Chateauraynaud, Torny, 1999). Certaines
associations, ou certaines personnalités se sont ainsi fait une spécialité (et une stratégie) d’alerter sur tel ou tel thème à travers les médias ; Ils créent ainsi une « attention publique » (Céfaï, 2003)
sur ces thématiques et établissent ainsi les conditions nécessaires à un processus de publicisation
de ces questions nouvelles (risques, développement durable, maladies, etc.) ou anciennes
(pauvreté, chômage, logement, etc.). Ainsi à l’intérieur/au sein de l’espace journalistique, les
éditoriaux réapparaissent dans leurs fonctions premières (Riutord, 2002), les registres du discours
journalistique (de la Haye, 1985) évoluent avec des formes d’écritures relativement proches de la
communication (publi-reportages par exemple).
3. De l’information des citoyens au rappel (imposition ?) de devoirs sociaux ?
Ce faisant, les discours médiatiques se font de manière croissante le relais de certains courants de
pensée élaborés des groupes de réflexion (think tank ou autre) (Quaderni n°70, 2009), ou
reprenant des débats sociaux émergents, rompant avec une des normes professionnelles les plus
intégrées, à savoir la neutralité. En outre, le discours journalistique a, sur ces questions, de plus
en plus tendance, à se faire l’écho de normes qu’il s’agit de publiciser et faire adopter, que ce soit
dans un secteur particulier - comme ceux de la santé ou de l’écologie - jusqu’à éditer ce qui serait
le « bon » comportement ou encore le « bon » journalisme.
4. Les potentialités participatives de l’internet : question sociétale en soi ou simple vecteur ?
On peut aujourd’hui considérer que l’Internet et ses potentialités participatives sont érigées au
rang de question sociétale : à la fois outil de démocratisation (accessibilité de l’information),
d’amélioration des libertés (Wikileaks, Le Post), il serait également la solution à la crise de la
presse (recherche d’un modèle économique pérenne de l’information numérique). En outre, les
acteurs porteurs des questions sociétales en émergence contournent le fonctionnement médiatique
classique et utilisent de façon massive les réseaux numériques. Les médias se font ainsi le relais
de ces débats sur les potentialités de l’internet et notamment sur les enjeux grandissants liés à la
diversification des pratiques journalistiques. L’évocation par les médias de cette question
devenue sociétale, orientant souvent le débat sur le « bon » journalisme ou le « vrai »
journalisme, déclenche-t-elle de réels repositionnements au sein de l’entreprise de presse ? Les
évolutions liées aux divers dispositifs techniques de communication des journaux en ligne sont-
elles liées à ces débats qui paraissent souvent faire office de vitrine plutôt que d’une réelle prise
en compte par les acteurs décideurs de l’entreprise ? Le journalisme en ligne sert-il les intérêts
des « lanceurs d’alerte » et serait-il devenu un nouveau « débouché » pour les groupes de presse ?
COMITE SCIENTIFIQUE
AUGEY Dominique, Professeure en sciences économiques, CERGAM, Université Paul Cézanne,
Aix-Marseille 3.
BENSON Rod, Université de New-York, sous réserve.
BOUQUILLION Philippe, Professeur en sciences de l’information et de la communication,
CEMTI, Université Paris 8. COMAN Mihaï, Professeur de sociologie de la communication à la faculté de Journalisme et des
Sciences de la Communication, Université de Bucarest.
DARRAS Eric, Professeur de science politique, IEP de Toulouse, LassP.
DAHLGREN Peter, Professeur en médias et communications, Université de Lund, Suède.
LAFON Benoit, Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication,
Gresec, Université Stendhal, Grenoble 3.
MIÈGE Bernard, Professeur émérite en sciences de l’information et de la communication,
Gresec, Université Stendhal Grenoble3.
MOEGLIN Pierre, Professeur en sciences de l’information et de la communication, LABSIC,
Paris Nord.
RIEFFEL Rémy, Professeur en sciences de l’information et de la communication, CARISM,
Université Paris Assas.
ROMEYER Hélène, Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication,
IUT Lannion, Gresec, Université Rennes 1.
SCHLESINGER Philipp, Professeur, Université de Glasgow, sous réserve.
TREMBLAY Gaëtan, UQAM, sous réserve.
WATINE Thierry, Professeur en sciences de la communication, Université Laval, Québec, sous
réserve.
COMITE D’ORGANISATION
HAMMACHE Razik,a secrétaire du Gresec.
HOLUBOWICZ Maria, Maître de Conférences en sciences de l’information – communication,
Université Stendhal, Grenoble 3.
LAFON Benoit, Maître de Conférences sciences de l’information – communication, Université
Stendhal, Grenoble 3.
NAIT BOUDA Faïza, doctorante, Gresec.
PAILLIART Isabelle, Professeure Sciences de l’information – communication, Gresec,
Université Stendhal Grenoble 3.
ROMEYER Hélène, Maître de Conférences Sciences de l’information – communication, Gresec,
Université Stendhal Grenoble 3.
SALLES Chloé, docteur en sciences de l’information et de la communication, Gresec.
SCHMITT Laurie, docteur en sciences de l’information et de la communication, Gresec.
SOUZAPAES Paula, doctorante, Gresec.
Coordination :
Hélène Romeyer , (helene.romeyer@-u-grenoble3.fr), et Benoit Lafon (benoit.lafon@u-
grenoble3.fr)
CALENDRIER PRÉVISIONNEL
19 février Date limite envoi des propositions (en français ou en anglais).
4000 signes incluant la présentation du terrain et l’ancrage théorique sur
lequel l’auteur appuie son texte.
Adresse : helene.romeyer@u-grenoble3.fr et benoit.lafon@u-
grenoble3.fr
25 mars Réunion comité scientifique
26 mars Avis aux auteurs sur acceptation ou refus des propositions 13 mai Date limite pour l’envoi des textes. Les textes seront remis
exclusivement en français.
26 et 27 mai Colloque
PUBLICATION
Les actes du colloque seront publiés dans la revue Les Enjeux de l’information et de la
communication.
Une sélection de certains textes et une synthèse des débats feront ensuite l’objet d’un ouvrage.